La CPI (Cours Pénale Internationale), créée en 2002 est une organisation internationale, chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crime contre l’humanité, de crime d’agression, et de crime de guerre. De 60 pays à sa création, la CPI est passée aujourd’hui à 123 états parties qui ont signé et ratifié le statut de Londres, statut fondateur de l’organisation.
Critiques
Les critiques sont nombreuses envers la CPI et sont dans les faits, justifiables :
- Justice de vainqueurs : le cas le plus parlant, est celui de la Cote d’Ivoire où seuls Laurent Gbagbo et ses partisans ont été jugés.
- Lenteur administrative : en 18 ans d’existence, on ne dénombre que 5 jugements définitifs.
- Inefficacité : la CPI ne dispose d’aucun moyen lui permettant de faire arrêter ses suspects. Il doit compter sur la bonne volonté des états de résidence des personnes suspectes et à l’encontre desquelles des procédures ont été entamées.
- Indépendance : la CPI s’appuie sur les travaux d’ONG qui lui fournissent des témoins et documents. Ces ONG et la Cour elle même sont financés largement par les Etats Européens et les USA.
- Justice de blancs : La grande majorité des affaires de la CPI concernent les dirigeants, anciens dirigeants ou hautes personnalités des Etats Africains.
Toutes ces critiques ont pu être débattu et discutés mais elles sont factuelles. Quelques pays sont sorties temporairement ou définitivement de l’organisation au fil du temps.
La CPI est également sensée être une justice internationale et impartiale, mais sa crédibilité est largement affaiblie dans la mesure où :
- La Chine, l’Inde n’ont pas signé le traité de Rome.
- Les USA ont signé ce traité mais ne l’ont toujours pas ratifié.
D’office, 3 des plus grandes nations qui constituent le quart au moins de la population mondiale, ne reconnaissent pas son autorité.
- Tous les Etats européens ont signé et ratifiés ce traité, mais également financent l’institution.
Est ce donc un hasard si aucun ressortissant d’un Etat majeur de la Zone Euro, n’a encore été conduit devant les instances de la cour ?
Les USA et la CPI : Je t’aime, moi non plus.
Les relations entre la CPI et les Etats-Unis d’Amérique ont évolués, au gré des présidences démocrates et républicaines.
Les Etats Unis ne sont pas en opposition à l’existence d’une justice internationale, tant qu’elle ne s’applique pas à eux, à leur droit d’exercer la force armée, et à leurs combattants engagés dans des conflits hors de leurs territoires.
Les Etats Unis veulent de tout temps pouvoir faire entrave aux règlements internationaux concernant les droits des hommes quand ils jugent cela nécessaire. En témoigne, l’existence du Camp de Guantánamo, hors de tout cadre juridique, où les Etats Unis peuvent emprisonner, questionner, ou torturer à vie, sans limite de temps et sans chef d’accusation tout combattant jugée illégal par leurs services.
Même si l’administration Obama a fait des efforts pour régulariser la situation entre la CPI et son pays, l’arrivée de Donald Trump sonne un retour en arrière.
La CPI, l’Afghanistan, et les combattants américains.
Les États-Unis ont pris des sanctions économiques contre les membres de la Cour pénale internationale. En effet, Le 11 juin 2020, Donald Trump a signé un décret présidentiel, annonçant des sanctions économiques à l’encontre des magistrats et responsables de la CPI. Il reproche à la Cour d’avoir lancé une enquête sur de possibles crimes de guerre commis par les États-Unis pendant la guerre d’Afghanistan. Cette enquête serait selon le président Trump :
une menace à la sécurité nationale.
L’enquête de la CPI vise les talibans et l’armée afghane. Elle vise également les militaires américains, et des agents de la CIA. En cause, leurs techniques utilisées lors d’interrogatoires menés dans les centres d’interrogatoires secrets créés après 2003. La procureure de la CPI ainsi que les juges se sont notamment appuyés sur des rapports du Sénat américain, publiés après des commissions d’enquête. Ces rapports font état de pratiques d’interrogatoire comme le waterboarding (la torture par l’eau), mais aussi l’isolement, le maintien à la lumière 24 heures sur 24 ou la nudité.
La porte-parole du président américain a déclaré dans un communiqué :
Malgré les appels répétés des États-Unis et de nos alliés en faveur d’une réforme, la Cour pénale internationale n’a rien fait pour se réformer et continue de mener des enquêtes motivées politiquement contre nous ou nos alliés, dont Israël.
Lors des prémisses de cette affaire en 2017, les Etats Unis avaient menacé d’annuler le visa de Fatou Bensouda, La Procureure de la CPI. Ils avaient évoqué également la possibilité de l’émission d’un mandat d’arrêt international à son encontre.
Face à cette nouvelle enquête, Donald Trump a annoncé le gel de tous les biens et avoirs financiers des membres de la CPI chargés de l’enquête en Afghanistan. Avec ces sanctions, les États-Unis espèrent dissuader la juridiction de poursuivre des militaires américains pour leur implication dans le conflit afghan.
Rappelons que la CPI ne peut trancher que sur la culpabilité d’un individu, pas d’un Etat. Dans le cadre de l’enquête sur les crimes possiblement commis lors de la guerre d’Afghanistan, la CPI ne pourrait donc qu’émettre des mandats d’arrêt à l’encontre de personnes. La France puis l’Europe ont exprimé leur « consternation » à l’annonce de la décision américaine.
Rien de nouveau.
Rappelons que, au plus fort de la pandémie de COVID-19, Washington voulait faire payer l’État chinois pour ses manquements (retards de communication sur la gravité de la situation, minimisation du nombre de décès liés au virus). Avocats, militants et élus républicains ont multiplié les demandes de saisines de la Cour pénale internationale, l’invoquant d’entamer des sanctions contre l’État chinois.
Rien de nouveau donc. Les Etats Unis, les grands justiciers du monde qui refusent la justice internationale quand ils s’appliquent à eux, et les autres états occidentaux qui dégainent leur indignation.